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Qu’est-ce que la condition de résidence en matière de naturalisation ?
La condition de résidence, en matière de naturalisation, recouvre en réalité trois questions distinctes : qu’est-ce que la résidence au sens du droit de la naturalisation ? quelle durée de résidence est nécessaire pour être naturalisé ? est-il nécessaire d’avoir sa résidence en France à la date de sa naturalisation ?
De prime abord, en matière de naturalisation, la condition de principe paraît assez simple : il faut résider en France depuis 5 ans pour être naturalisé (article 21-16 et 21-17 du code civil).
Cependant, en pratique, les choses sont plus compliquées pour les demandeurs et leurs avocats.
En effet, il existe non seulement des exceptions, prévues par le code civil, mais également des limites liées à l’interprétation donnée par les juridictions à certaines notions utilisées en la matière.
Ainsi, à titre d’exemple, contrairement à ce que l’on peut croire de prime abord, la définition de la « résidence » n’est pas si facile que ça en matière de naturalisation. En effet, il ne suffit pas d’être domicilié en France, d’y travailler et d’y payer ses impôts pour être regardé comme ayant sa « résidence » en France.
Aussi, pour y voir un peu plus clair sur la condition de résidence, il est nécessaire d’abord trois sujets distincts :
- Qu’est-ce que la « résidence » ? En effet, comme indiqué ci-dessus, cette « résidence » n’est pas assimilable aux autres notions de résidence, par exemple au sens fiscal.
- Quel délai de résidence est nécessaire pour être naturalisé ? Comme indiqué supra, le principe est une durée de 5 ans. Mais ce principe connaît de nombreuses exceptions.
- Est-il nécessaire de résider en France au moment du décret de naturalisation ? En effet, il est nécessaire de voir dans quels cas cette condition trouve à s’appliquer.
La réponse à ces trois questions doit permettre, d’une part, de mieux comprendre comment fonctionne la naturalisation et, d’autre part, de déterminer à quel moment il est le plus opportun de déposer une demande de naturalisation.
I. Une définition spécifique de la « résidence »
Pour bien comprendre cette définition, il faut distinguer la résidence en France et la résidence à l’étranger. En effet, il est possible, dans certaines hypothèses, de demander sa naturalisation en résidant à l’étranger. Or, l’appréciation de la « résidence » est alors différente.
A. La résidence en France : le centre des intérêts matériels et affectifs
Pour être regardé comme ayant sa « résidence » en France au sens de la législation sur la naturalisation, il ne suffit pas d’être domicilié en France, d’y travailler et d’y payer ses impôts.
Il existe, en réalité, d’autres conditions, qui ne se résument pas à la résidence fiscale ou, matériellement, à l’endroit où l’on vit.
Il faut non seulement vivre en France mais il faut que le « centre [des] intérêts » du demandeur à la naturalisation soit en France.
Cette condition ne ressort pas des textes. C’est la jurisprudence (CE. Sect. 28 février 1986, n° 57464, publiée au Recueil) qui a estimé que la « résidence » au sens des articles 21-16 et suivants du code civil devait s’entendre ainsi.
L’idée derrière cette affirmation de principe est que pour être regardé comme résidant réellement en France, il faut y vivre au sens matériel mais il faut surtout que ses intérêts s’y trouvent. Ces intérêts sont de deux ordres :
- Le centre affectif
Cette condition signifie qu’en principe, si le conjoint ou les enfants mineurs du demandeur à la naturalisation résident à l’étranger, le centre des intérêts affectifs de ce dernier n’est pas en France.
Ici encore, il existe des limites et dérogations.
En effet, ce principe n’est pas absolu.
S’agissant du conjoint, il peut arriver, lorsque la vie familiale et professionnelle du demandeur à la naturalisation est bien développée en France, que la circonstance que son conjoint réside à l’étranger ne lui est pas opposée (voir, par exemple : CE. SSR. 25 mai 2010, n° 327922, mentionnée aux tables ; CE. SSR. 10 décembre 1993, n° 118611, publiée au Recueil ; CE. SSR. 13 juin 1986, n° 57689).
De même, s’agissant des enfants mineurs, il existe différentes limites. Leur résidence à l’étranger n’a pas d’incidence sur le centre des intérêts, notamment, si :
- le demandeur à la naturalisation n’a pas d’autorité parentale sur eux,
- les enfants ont disparu (CAA Nantes, 15 février 2013, n° 12NT01495),
- les enfants ont fait l’objet d’une demande de regroupement familial (voir, par exemple, en ce sens : CAA Nantes, 28 mai 2018, n° 17NT01947 ; CAA Nantes, 29 décembre 2017, n° 16NT02288 ; CAA Nantes, 16 septembre 2016, n° 15NT03356), même si elle a été refusée ou est en cours d’instruction,
- les enfants à l’étranger sont des enfants adultérins et le demandeur vit en France avec son conjoint légitime et les enfants nés de cette union (CAA Nantes 19 juillet 2019, n° 19NT00757),
Dans tous les cas, il demeure certain que le « centre [d]es attaches familiales » doit être en France pour être naturalisé.
- Le centre matériel
Le centre des intérêts « matériels » du demandeur à la naturalisation doit également se trouver en France.
Cette sous-condition vise principalement les personnes dont les revenus proviennent de l’étranger.
En effet, lorsque l’activité du demandeur est exercée à l’étranger, ou que des membres de sa famille résidant à l’étranger subviennent à ses besoins, alors il est considéré que le centre de ses intérêts matériels n’est pas en France.
En revanche, il n’est pas exigé que l’ensemble des revenus du demandeur à la naturalisation viennent de France (voir, par exemple : CE. SSR. 25 mai 2010, n° 327922, mentionnée aux tables). Il peut parfaitement avoir certains revenus venant de l’étranger (et même des revenus majoritaires) à condition qu’il dispose également de revenus en France.
- L’appréciation sévère de cette condition
Il convient d’indiquer ici que la condition liée au « centre [des] intérêts » du demandeur à la naturalisation est appréciée assez strictement.
En effet, cette condition est en principe appréciée par la technique dite du « faisceau d’indices » (voir, par exemple, en ce sens : CE. SSR. 10 juillet 2013, n° 355899).
Autrement dit, cela signifie qu’il convient de tenir compte d’un certain nombre d’indices, de les mettre en balance et de regarder de quel côté s’oriente la situation du demandeur. Théoriquement, la méthode est donc la même que pour l’appréciation du centre des intérêts matériels et moraux des fonctionnaires en matière de congés (voir l’article « Qui peut obtenir un congé bonifié ? »).
Ainsi, il ne s’agit pas en principe de critères cumulatifs. De la sorte c’est la situation globale du requérant qui doit être prise en compte et, si un des « indices » manque, il peut être compensé par un autre.
Mais dans la pratique, cette appréciation reste très sévère. Il est donc assez difficile, lorsque l’un des « indices » manque, de démontrer que le centre des intérêts est en France.
B. La résidence à l’étranger : les cas d’assimilation à la résidence en France
Contrairement à ce que l’ont pourrait croire de prime abord, la résidence à l’étranger ne conduit pas obligatoirement au rejet de la demande de naturalisation.
En effet, dans certaines hypothèses, la résidence à l’étranger est assimilée à la résidence France. C’est ce que prévoit l’article 21-26 du code civil. Il prévoit 3 cas d’assimilation à la résidence en France :
- La résidence à Monaco (en vertu de l’article 65 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993),
- La présence hors de France dans une formation de l’armée française,
- La présence hors de France « d'un étranger qui exerce une activité professionnelle publique ou privée pour le compte de l'Etat français ou d'un organisme dont l'activité présente un intérêt particulier pour l'économie ou la culture française ».
Ce dernier cas de figure mérite que l’on s’y attarde un peu plus longuement.
En effet, les deux premiers cas sont assez simples. Ils concernent les personnes vivant à Monaco ou étant à l’étranger en raison de leurs activités militaires.
Le troisième cas recouvre :
- Les personnes qui travaillent à l’étranger pour l’Etat français. Cette première catégorie ne présente pas beaucoup de difficulté dans la mesure où les personnes concernées sont désignées par leur employeur.
- Les personnes qui travaillent pour un « organisme » dont l’activité présente un « intérêt particulier pour l'économie ou la culture française ». Cette seconde catégorie est plus difficile à appréhender.
En effet, l’existence d’un « intérêt particulier » pour la France est, par essence, assez subjective et laisse une marge d’appréciation importante.
De plus, les décisions de justice sont relativement rares en ce domaine. Néanmoins, il en ressort que l’« intérêt » pour la France doit présenter une certaine force.
A cet égard, il ne suffit pas, par exemple, que l’entreprise étrangère pour lequel le demandeur à la naturalisation travaille soit en relation commerciale avec des entreprises françaises (CE. SSR. 25 avril 1990, Ministre des affaires sociales c. consorts Takla, n° 89678 ; CAA Nantes, 28 décembre 2007, M. Ahmed X, n° 07NT02229).
De même, le fait de travailler pour une organisation internationale dont la France est membre ne suffit pas à faire regarder l’activité du demandeur à la naturalisation comme ayant un intérêt particulier pour la France (CE. SSJS. 23 février 1994, Epoux Ras Work, n° 120262 ; CAA Nantes, 20 mars 2017, n° 15NT03675).
Le demandeur à la naturalisation ou son avocat doivent donc argumenter de manière construite sur ce point, puisque le lien avec la France doit être relativement sérieux :
- Il va de soi que si le demandeur à la naturalisation travaille pour un organisme public français qui n’est pas l’Etat (une collectivité territoriale ou un établissement public), il est assez probable que l’activité de cet organisme soit regardée comme ayant un intérêt particulier pour la France.
- Si le demandeur à la naturalisation travaille à l’étranger pour une grande entreprise française (CE. SSR. 24 juin 1988, M. Icho X, n° 68062, mentionnée aux tables ; CE. SSR. 17 octobre 1986, Mme de F, n° 62279, mentionnée aux tables). Et ce, quel que soit le niveau de son poste au sein de cette entreprise (CE. SSJS. 26 novembre 1986, Ministre des affaires sociales c. Mme Jacqueline X, n° 77512 ; CE. SSR. 17 octobre 1986, Mme de F, n° 62279, mentionnée aux tables).
- S’il travaille pour organisation internationale qui, en elle-même, présente un intérêt particulier pour la France. Par exemple : si elle régit la coopération monétaire de la France avec d’autres pays (CE. SSR. 26 décembre 2012, M. Maliko, n° 350198, mentionnée aux tables).
Ainsi, lorsque le demandeur à la naturalisation travaille pour un organisme de ce type, son séjour à l’étranger est assimilé à un séjour en France.
II. Un délai de résidence qui peut varier
Une fois la « résidence » définie, encore faut-il savoir combien de temps la personne doit résider en France (ou être dans l’un des cas mentionnés à l’article 21-26 du code civil expliqué ci-dessus), pour pouvoir demander sa naturalisation.
En effet, il a déjà été indiqué qu’en principe, ce délai est de 5 ans (article 21-17 du code civil). Toutefois, il existe un certain nombre d’hypothèses dans lesquelles la condition de résidence est réduite, voire supprimée.
Il convient donc d’étudier les trois séries d’hypothèses qui sont prévues par le code civil.
Mais au préalable, il est important de souligner comment les durées de résidence sont calculées.
En effet, contrairement à ce que l’on pourrait penser de prime abord, il ne suffit pas d’avoir résidé, dans sa vie, 5 ans ou 2 ans (selon les cas) en France.
Il est nécessaire que ce délai de résidence soit continu et immédiatement antérieur au dépôt de la demande de naturalisation.
Ainsi, même si une personne a vécu pendant plusieurs décennies en France, mais s’est absentée pendant 1 an ou 2 dans la période qui a précédé sa demande de naturalisation, alors elle sera regardée comme ne remplissant pas la condition tenant à la durée de résidence (voir, par exemple : CAA Nantes, 12 juillet 2013, n° 12NT03037).
Cette précision sur la méthode de décompte des années de présence en France méritait d’être apportée.
A. Les demandes proposées par les ministres
Dans un tel cas, il n’existe aucune condition de durée de résidence.
Cette hypothèse appelle peu de commentaires.
Elle concerne les cas dans lesquels le ministre de la défense ou le ministre des affaires étrangères propose la naturalisation d’un étranger.
Deux cas sont prévus par les textes :
- D’une part, le ministre de la défense peut proposer la naturalisation d’un étranger blessé ou tué alors qu’il était en mission pour l’armée française (article 21-14-1 du code civil).
- D’autre part, le ministre des affaires étrangères peut proposer la naturalisation de toute personne francophone qui contribue « au rayonnement de la France et à la prospérité de ses relations économiques internationales » (article 21-21 du code civil).
Dans ces deux hypothèses, la condition tenant à la durée de résidence – condition dite de « stage » – est tout simplement supprimée.
Il convient de préciser qu’il n’est pas possible de se prévaloir de ces dispositions si l’un des ministres susmentionnés ne fait pas de proposition.
En effet, il est impossible pour le demandeur ou son avocat d’indiquer, après un refus de naturalisation, que le ministre aurait dû faire cette proposition, pour affirmer que le demandeur à la naturalisation n’avait pas à remplir la condition de stage (voir, par exemple : CAA Nantes, 14 octobre 2011, Mme Nawal X, n° 11NT00233 ; CAA Nantes, 28 décembre 2007, M. Ahmed X, n° 07NT02229).
B. Les cas dans lesquels la condition de stage est supprimée
Le code civil (articles 21-19 et 21-20) prévoit différentes hypothèses dans lesquelles la condition de stage est supprimée.
Autrement dit, cela signifie que le demandeur à la naturalisation n’a pas besoin d’être présent sur le territoire français depuis une durée déterminée. Il peut donc, théoriquement, être arrivé la veille de sa demande de naturalisation.
Ces cas dans lesquels la naturalisation peut intervenir sans condition de durée de résidence sont les suivants :
- Le demandeur à la naturalisation a accompli des services militaires pour l’armée française
Cette première hypothèse n’appelle pas d’observations particulières.
En effet, elle vise à faciliter l’accès à la nationalité de ceux qui se sont engagés pour l’armée française.
- Le demandeur à la naturalisation a rendu des « services exceptionnels » à la France ou sa naturalisation présente un « intérêt exceptionnel »
Cette hypothèse ne peut concerner que des cas très rares. Le caractère « exceptionnel » de l’intérêt ou des services rendus rend son application nécessairement peu fréquente.
Il pourrait, par exemple, concerner des artistes de renommée internationale, des personnes ayant réalisé des actes héroïques, etc.
Bien entendu, il appartient au demandeur à la naturalisation de démontrer ces services « exceptionnels » (CAA Nantes, 1er mars 2013, n° 12NT02184).
Ce type de demande suit une procédure spéciale qui la rapproche des cas dans lesquels la naturalisation est proposée par un ministre.
En effet, deux étapes doivent être suivies si une telle demande est présentée :
- un rapport motivé du ministre compétent doit être rédigé par ce dernier,
- le Conseil d’Etat doit rendre un avis à la lumière de ce rapport.
La procédure est donc très encadrée.
- Le demandeur à la naturalisation a obtenu le statut de réfugié
Ce cas de figure n’appelle pas d’observations particulières.
En effet, l’idée derrière ce cas de suppression de la condition de stage est que la personne réfugiée en France est vouée à y rester puisque, notamment, elle ne peut pas retourner dans son pays d’origine.
Il n’y a donc aucune raison de la faire attendre 5 ans sur le territoire avant de pouvoir demander sa naturalisation.
- Le demandeur à la naturalisation « appartient à l'entité culturelle et linguistique française », si la langue française est l’une des langues officielles de son pays et si la langue française est sa langue maternelle ou si elle a suivi 5 ans d’études dans un établissement enseignant en langue française
Il y a trois conditions cumulatives à l’application de cette exception.
• La première est celle tenant à l’appartenance à l’entité linguistique et culturelle française.
Autrement dit, il faut être né et avoir grandi dans un pays sous influence culturelle française. Ce qui recouvre deux séries d’hypothèses : les pays frontaliers de la France où l’on parle le français et les pays ayant été colonisés par la France.
• La deuxième condition, tient à ce que le pays d’origine du demandeur doit avoir la langue française comme langue officielle.
Il n’est pas exigé que le français soit la seule langue officielle mais elle doit être l’une des langues officielles.
Pour faciliter les choses, la circulaire DPM/N3/DLPAJ/DAPAF n° 2006-446 du 10 octobre 2006 est accompagnée d’une annexe dressant la liste des pays dont le français est la langue officielle.
Cette liste est bien entendu vouée à évoluer en fonction des éventuelles évolutions dans chaque pays concerné.
Cette condition doit impérativement être remplie. Cela signifie que, même si le pays dont le demandeur à la naturalisation est originaire appartient à l’entité culturelle française, il ne pourra pas bénéficier de cette suppression de la condition de stage pour être naturalisé si la langue officielle n’est pas le français.
C’est ce qui ressort très clairement du libellé du texte, confirmé par la jurisprudence (CAA Nantes, 12 juillet 2013, n° 12NT03037 ; CAA Nantes, 2 décembre 2011, Melle Maryem X, n° 11NT00472 ; CAA Nantes, 16 février 2010, M. Imed X, n° 09NT01307).
Ainsi, à titre d’exemple, les algériens, tunisiens et marocains sont exclus du bénéfice de ces dispositions, puisque leurs pays respectifs n’ont pas fait le choix de conserver le français parmi leurs langues officielles.
• La troisième condition vise deux hypothèses alternatives : soit le français doit être la langue maternelle du demandeur à la naturalisation, soit il doit avoir suivi au moins 5 ans d’études dans un établissement enseignant en français.
Cette dernière condition n’appelle pas d’observations particulières. Elle vise à s’assurer que le demandeur à la naturalisation est bien de « culture » française.
C. Les cas dans lesquels le stage est réduit à deux ans
L’article 21-18 du code civil prévoit également des hypothèses dans lesquelles le stage, sans être supprimé, voit sa durée réduite à deux ans.
Trois cas sont prévus par cet article :
- Le demandeur à la naturalisation a accompli avec succès deux années d’études supérieures en vue d’acquérir un diplôme français
Cette condition appelle peu d’observations, si ce n’est qu’elle est appréciée strictement.
Ainsi, il faut démontrer que les études suivies doivent conduire à l’obtention d’un diplôme français.
De la sorte, l’attestation de réussite de cours d’un institut du CNAM ne suffit pas s’il n’est pas démontré que ces cours débouchent sur un diplôme (CAA Nantes, 16 février 2010, n° 09NT01307).
- Le demandeur à la naturalisation peut rendre des « services importants » à la France par ses capacités ou ses talents
Ce cas d’ouverture se rapproche de celui tiré des services « exceptionnels » mais s’en éloigne dans la mesure où, d’une part, ce cas de figure peut concerner les services qui seront rendus à l’avenir et, d’autre part, l’exigence est moindre puisque les services ont seulement besoin d’être « importants ».
De la sorte, ce cas de figure est moins exigent, mais il implique tout de même une certaine importance de l’apport à la société française. Ainsi, le fait d’avoir créé une société de tourisme employant plusieurs salariés n’est pas suffisant pour être regardé comme ayant rendu des services « importants » à la France (CAA Nantes, 2 février 2010, M. Rajiv X, n° 09NT00733).
Ce type de naturalisation paraît constituer la suite logique de l’obtention d’un titre de séjour « compétences et talents ».
En effet, dans ces deux hypothèses, la décision de l’autorité publique est justifiée par les capacités, les compétences et les talents de l’étranger.
- Le demandeur à la naturalisation a un parcours « exceptionnel » d’intégration au vu de ses activités civiques, scientifiques, économiques, culturelles ou sportives
Ce cas de réduction de la durée du stage recouvre partiellement le cas qui précède.
En effet, dans ces deux hypothèses, les personnes talentueuses peuvent prétendre à une naturalisation au bout de deux ans de présence en France.
Ce second cas est cependant un peu différent puisqu’il permet aussi aux étrangers qui ont des « activités civiques », notamment des engagements associatifs, de bénéficier d’une naturalisation au bout de deux ans si leur parcours est regardé comme exceptionnel.
Cette hypothèse n’appelle donc pas de précisions particulières.
Telles sont donc les hypothèses, brièvement résumées, dans lesquelles la condition de stage de 5 ans est réduite ou supprimée
III. Une résidence en France à la date de la naturalisation
En vertu de l’article 21-16 du code civil, il est impératif d’avoir sa résidence en France au moment du décret de naturalisation.
Ce principe est simple.
Il n’appelle que trois remarques.
- Concernant les personnes dont la résidence à l’étranger est assimilée à la résidence en France
S’agissant des personnes dont la résidence à l’étranger est assimilée à la résidence en France en vertu de l’article 21-26 du code civil (résidence à Monaco, résidence pour les besoins de l’armée française, résidence pour travailler dans un organisme dont l’activité présente un intérêt particulier), cette condition ne s’applique pas.
En effet, comme ces demandeurs à la naturalisation sont regardés, par une fiction, comme résidant en France, il n’est pas nécessaire qu’ils soient réellement sur le territoire au moment du décret de naturalisation.
- Concernant les personnes qui bénéficient d’une suppression ou d’une réduction du stage
S’agissant des personnes qui n’ont pas à accomplir de stage ou qui n’ont qu’à accomplir un stage réduit à deux ans, il reste impératif qu’ils soient sur le territoire français au moment du décret de naturalisation.
En effet, ces deux conditions sont bien distinctes comme le rappelle régulièrement la jurisprudence (CAA Nantes, 20 mars 2017, n° 15NT03675 ; CAA Nantes, 19 avril 2013, n° 12NT02582).
Cela signifie donc que, même si une personne peut déposer une demande sans condition de durée de résidence, elle doit néanmoins résider en France au moment de sa demande et y rester jusqu’au décret de naturalisation.
- Concernant la résidence à la date de la demande
Le code civil ne précise pas que le demandeur à la naturalisation doit résider en France à la date de sa demande.
Toutefois, cette condition doit être en pratique être remplie (sauf pour ceux dont la résidence à l’étranger est assimilée à la résidence en France), pour au moins deux raisons.
? D’une part, s’agissant des personnes tenues de suivre un « stage » de 2 ou 5 ans, il est nécessaire que la durée de résidence soit continue jusqu’à la date de la naturalisation.
Dans ces conditions, pour cette catégorie de demandeurs à la naturalisation, il est certain qu’ils doivent résider en France au moment de leur demande.
En effet, le délai se décomptant de leur dernier début de résidence en France au décret de naturalisation, il est nécessaire que la demande – que se trouve entre ces deux dates – soit présentée à un moment où le demandeur est en France.
? D’autre part, cette condition est également valable pour les personnes qui n’ont aucun stage à accomplir dans la mesure où, si à la date du dépôt de leur demande elles ne résident pas en France, elles risquent fort de se voir opposer, dès les jours suivants, un refus de naturalisation fondé sur ce motif.
Dans ces conditions, en pratique – et à part pour les personnes dont la résidence à l’étranger est assimilée à une résidence France – tous les demandeurs à la naturalisation doivent résider en France au moment de leur demande.
Janvier 2020
Voir l'article en PDF : Qu'est-ce que la condition de résidence en matière de naturalisation ? (139.71 Ko)
Voir l'article sur Legavox : https://www.legavox.fr/blog/me-bruno-roze/condition-residence-matiere-naturalisation-28077.htm
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Date de dernière mise à jour : 24/01/2020