Par une décision n° 402103 du 8 novembre 2017, le Conseil d’Etat considère qu’un agent muté dans l’intérêt du service, s’il doit être mis à même de présenter ses observations avant l’émission de la décision, n’a pas à être informé du lieu sur lequel sa mutation est envisagée.
Dans cette affaire, était en cause un agent qui, à l’issue d’une exclusion temporaire disciplinaire, n’avait pas été réintégré, dans l’intérêt du service, sur son poste mais dans un autre établissement de son administration. En effet, le déplacement d’office de l’agent ne présentait pas – en l’espèce – un caractère disciplinaire, le déplacement visant, non pas à sanctionner l’agent, mais à prévenir les éventuels troubles que pourrait susciter son retour à l’issue de son exclusion.
Dans ce type d’hypothèse, l’agent doit être mis à même, avant l’émission de la décision, de demander son dossier et de présenter ses éventuelles observations sur la décision à intervenir. En effet, même si le changement d’affectation ne présente pas un caractère disciplinaire, l’agent dispose de ces garanties anciennes, fixées par l’article 65 de la loi du 22 avril 1905.
Il convient de souligner que l’agent doit être « mis à même » d’exercer ces garanties. Autrement dit, il n’a pas à être invité à le faire mais doit cependant disposer d’un délai entre l’annonce de ce que la décision de mutation va être prise et l’intervention effective de cette décision (CE. Sect. 23 juin 1967, M. Mirambeau, n° 55068, publiée au Recueil ; CE. SSR. 14 mai 1986, Syndicat national des cadres hospitaliers CGT-FO, 60852, mentionnée aux tables ; ou plus récemment : CAA Lyon, 28 juin 2011, Mme Virginie X, n° 10LY01394). Ce délai le met donc à même – selon la jurisprudence – de demander son dossier et de faire valoir ses observations, bien qu’il n’y ait pas été invité.
Au cas présent, la cour administrative d’appel de Marseille avait considéré (CAA Marseille, 24 mai 2016, n° 14MA04315) que ces garanties n’avaient pas été respectées dans la mesure où l’agent n’avait pas été informé de l’établissement dans lequel il allait être déplacé, de sorte qu’il n’avait pas été mis à même de présenter ses observations.
Cette position, empreinte de logique, consiste à considérer que si l’agent ne connaît pas le site sur lequel il sera muté (à un kilomètre de son lieu de travail initial ou à l’autre bout de la France), alors il n’est pas à même de présenter utilement ses observations.
Toutefois, telle n’est pas la solution retenue par le Conseil d’Etat dans la décision commentée, rendue à la suite du pourvoi formé par La Poste contre l’arrêt de la cour annulant la mutation qu’elle avait décidée.
En effet, la Haute juridiction considère que la cour a commis une erreur de droit et que l’agent n’avait pas à être informé du lieu précis de son changement d’affectation pour faire valoir utilement ses observations.
Cette solution est regrettable car si, juridiquement, une mesure de mutation d’office dans l’intérêt du service est la même quel que soit le nouveau lieu d’affectation, de sorte que l’agent peut présenter des observations sur le principe de la mutation, il n’en demeure pas moins que, pratiquement, la mutation dans un établissement situé dans la même ville ou à des centaines de kilomètres du lieu initial de travail n’est pas la même chose.
Aussi, pour donner un effet utile aux observations de l’agent, il aurait été préférable d’imposer à l’administration d’indiquer le lieu d’affectation envisagé.