Dans le jugement commenté (TA Paris, 21 décembre 2023, Mme Théa M, n° 2214989), obtenu par le cabinet, le tribunal administratif apporte des précisions sur les hypothèses dans lesquelles cette seconde sélection est légale.
Il convient tout d’abord de souligner avant d’examiner ce jugement que la légalité de l’existence de plusieurs parcours au sein d’un même master est désormais établie.
En effet, le Conseil d’Etat a déjà eu l’occasion de l’indiquer dans une décision de principe (CE. CHR. 8 décembre 2021, n° 449272, publiée au recueil).
Toutefois, il n’avait pas fourni à l’occasion de cette décision le mode d’emploi de la sélection des étudiants entre les différents parcours à l’entrée en master 2 puisqu’il n’était saisi que d’une question particulière relative à l’exercice de la profession de psychologue (voir sur ce point le commentaire de la décision : L’articulation complexe entre admissions en master, parcours et sélection).
La sélection entre les parcours
Dans le jugement commenté ici, le tribunal administratif de Paris a donné un début de réponse sur les conditions de cette seconde sélection.
● Tout d’abord, il a considéré que l’université pouvait choisir elle-même quels étudiants iraient dans un parcours ou un autre au sein du master 2.
Cette solution, bien qu’elle ne soit pas exempte de critique, apparaissait la plus probable comme indiqué dans l’article précité (L’articulation complexe entre admissions en master, parcours et sélection).
Le tribunal a également précisé que cette sélection pouvait se faire « au regard de leurs résultats et de leur profil ».
Il s’agit donc d’une sélection assez classique (notes et curriculum vitae).
● Ensuite, le tribunal administratif de Paris a jugé que les critères de cette sélection devaient suivre les mêmes règles procédurales que les critères de sélection pour l’entrée en master 1.
Autrement dit, ces règles doivent être fixées par le conseil d’administration, par une délibération régulièrement publiée. Le tribunal ne l’a pas précisé, mais cette délibération, comme tout acte réglementaire des universités doit être transmis au recteur pour être opposable (sur le fondement de l’article L. 719-7 du code de l’éducation (ex : CAA Paris, 21 septembre 2021, n° 20PA03428 ; CAA Douai, 5 octobre 2021, n° 19DA01886 ; voir, pour un exemple plus récent : TA Melun, 14 avril 2023, M. Ameziane A, n° 2106104).
Dans l’affaire jugée par le tribunal administratif, le débat pouvait s’arrêter là, l’université ne démontrant pas (et ne soutenant d’ailleurs même pas) qu’une telle délibération du conseil d’administration avait été adoptée.
● Enfin, le tribunal administratif de Paris a indiqué, sans qu’il soit tout à fait certain qu’il s’agit d’une condition de la légalité de la sélection que « les critères de sélection [soient] portés à la connaissance des étudiants dès l’entrée en première année de master ».
Cette précision apparaît logique dans la mesure où les étudiants doivent être informés, une fois qu’ils ont été acceptés en master, comment la sélection sera opérée entre les parcours à l’entrée en master 2.
Mais il n’est pas possible de déterminer s’il s’agit d’une condition de la légalité de la sélection.
Toutefois, il est certain que, par ce jugement, le tribunal a apporté des précisions sur la sélection des étudiants entre les différents parcours d’un master 2.
Le jugement de l’affaire
Au-delà des précisions apportées sur les conditions dans lesquelles la sélection peut être légalement opérée entre les différents parcours du master, le tribunal administratif de Paris a également retenu certains éléments spécifiques à l’affaire qui méritent d’être mentionnés.
D’une part, pour souligner l’illégalité du dispositif en l’espèce, le tribunal a ajouté que l’université ne contestait pas que sur son site internet, il était indiqué que l’accès au parcours en cause se faisait « de plein droit » pour les titulaires du master 1.
En effet, dans cette affaire, l’université n’indiquait nulle part sur son site qu’une sélection était opérée entre les parcours et fournissait, au contraire, l’impression que l’accès était de droit.
D’autre part, et surtout, il est intéressant de noter que le tribunal a enjoint à l’université, non pas de réexaminer la demande de l’étudiante mais bien d’inscrire l’étudiante dans le parcours si elle en faisait la demande.
Cette injonction apparaît logique dans la mesure où la sélection étant dénuée de base légale, l’université ne pouvait s’opposer à l’inscription de l’étudiante dans le parcours de son choix. Mais cette précision du tribunal méritait d’être soulignée.
Ainsi, ce jugement rendu par le tribunal administratif de Paris suppose une certaine attention.