Par une décision n° 411227 du 8 juin 2017, le juge des référés du Conseil d'Etat estime que l'interdiction adressée à titre conservatoire à un élève de troisième de se présenter à l'établissement dans l'attente de la réunion du conseil de discipline devant se prononcer sur les faits qui lui sont reprochés ne porte pas d'atteinte grave et manifestement illégale au droit à l'éducation.
Plus précisément, le juge des référés du Conseil d'Etat retient, d'une part, que cette décision, par nature conservatoire, ne méconnaît pas le principe de la présomption d'innocence. En effet, dans la mesure où la décision d'interdiction ne se prononce pas sur la culpabilité de l'élève mais se contente de l'éloigner dans l'attente de la décision du conseil de discipline, il est logique qu'elle soit regardée comme étant sans incidence sur la présomption d'innocence.
Cette solution s'inscrit dans la droite ligne de ce que jugent les juridictions administratives à propos des procédures disciplinaires diligentées contre les agents publics. Ainsi, il a pu être jugé que des décisions affectant provisoirement des agents sur d'autres fonctions (CAA Lyon, 18 mars 2014, M. D c. France Télécom, n° 13LY00275), leur demandant de ne plus se rendre sur leur lieu de travail (CAA Paris, 26 juin 2007, Mme Froidurot, n° 05PA01294), leur interdisant de pénétrer dans certains locaux (CAA Versailles, 14 mars 2006, M. Toure, n° 03VE02879) ou leur retirant certaines fonctions (CAA Paris, 28 décembre 2005, Mme Gonnet, n° 02PA02984) étaient légales dès lors qu'elles présentaient un caractère conservatoire.
De même, toujours en matière de fonction publique, il est également prévu par les textes qu'un agent peut être suspendu de ses fonctions dans l'attente d'une sanction (article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983).
Au cas présent, le texte en cause est rédigé de manière similaire dans la mesure où l'article D. 511-33 du code de l'éducation prévoit que le chef d'établissement peut interdire l'accès à un élève en attendant la réunion du conseil de discipline.
Dès lors, les solutions retenues en droit de la fonction publique sont parfaitement transposables dans la mesure où le raisonnement va bien au-delà des relations agents/administration : une mesure provisoire ne se prononce pas sur la culpabilité de la personne concernée et vise uniquement à protéger la sérénité du service public en attendant qu'une décision soit prise.
Aussi, que la personne concernée soit un agent ou un usager du service public (un élève en l'occurrence), le raisonnement doit être le même.
C'est pourquoi, le juge des référés du Conseil d'Etat estime en l'espèce que la décision provisoire ne méconnaît « d'aucune manière » la présomption d'innocence.
D'autre part, le Conseil d'Etat se prononce sur l'éventuelle atteinte portée par cette mesure au droit à l'éducation mais rejette ce moyen.
En effet, il aurait été concevable que le droit à l'éducation, lequel est un droit fondamental, fasse obstacle à tout éloignement de l'élève afin que ce dernier ne soit pas privé de ses enseignements.
Cependant, cette solution n'est pas celle retenue par le Conseil d'Etat. Le juge des référés paraît considérer de manière générale que ce type de mesure ne constitue pas une atteinte manifestement illégale au droit à l'éducation.
Toutefois, cette solution n'est peut-être pas aussi générale qu'il y paraît dans la mesure où le juge relève qu'en l'espèce, des mesures ont été prises que ses cours soient transmis à l'élève sous forme dématérialisée. Dès lors, même si ce dernier n'a pu assister aux cours, il n'a pas été privé de son droit à l'éducation. En outre, le juge mentionne que les cours se sont terminés le 10 juin 2017, soit quinze jours après la mesure litigieuse. De la sorte, la mesure a porté sur une période relativement brève et n'a pas empêché l'élève se suivre les cours.
Ainsi, le juge des référés du Conseil d'Etat considère que la décision provisoire d'éloignement prise par la proviseure du collège ne fait pas obstacle à l'exercice du droit à l'éducation.